Billet d’humour: Biographie (imaginaire) d’un généalogiste

Je ne sais pas si quelqu’un se souvient d’un article un peu… euh… « cliché » sur les jeunes en généalogie.

Petit rappel: la FFG a posté l’article en lien ci-dessus à l’intention des jeunes. Image manga, conversation un peu débile, référence culturelle prononcée (Les Experts). Bref, une belle tentative pour attirer les jeunes mais un peu cliché. Après tout, la généné… généa… généalogie c’est aussi un dépassement des clichés avec une blogosphère très active et très jeune. Mais les clichés persistent, sur les jeunes et aussi sur les généalogistes. C’est pourquoi j’ai décidé de répondre (gentiment) en proposant dans cet article une biographie imaginaire d’un généalogiste suivant tous les clichés qui me vinrent à l’esprit.

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Vive les clichés!

C’est parti.

« René Dupont est un jeune retraité frétillant. Domicilié à Bourg-en-Bresse depuis toujours, il a décidé de se lancer dans une aventure incroyable : la généalogie. Muni de sa canne, de son dentier et de son pull de cachemire, ce généalogiste de 92 ans n’en est pas à son coup d’essai. Membre actif depuis près de cinquante ans de l’Association de Sauvegarde du Patrimoine Burgien, créateur de nombreuses associations comme le regretté Club Historique de la Région Rhône-Alpes ou comme feue la Société des Châteaux Bressans, il parcoure désormais toute la France à la quête de ses ancêtres.

Ancien secrétaire de l’assistant du Vice-président de la Préfecture de l’Ain, René a toujours fait montre d’un respect sans égal pour le service public. Altruiste jusqu’au bout, René a même accepté de faire des relevés de commune du Dauphiné comme Dolomieu ou Vézéronce. Il se défend de tout comportement exceptionnel : « C’est normal ce que je fais ; après tout, la généalogie c’est avant tout le partage, l’entraide. Tout le monde devrait être désintéressé comme moi. »

Admirateur d’Ellsworth Toohey, René se rend chaque semaine au local de la récente association dont il est le président, le Cercle Généalogique de l’Ain et de l’Ailleurs où il publie la Gazette Généalogique. Mais ce n’est pas toujours facile pour René : « J’ai beau chercher, aucun membre de l’association n’a trouvé d’oncle en Amérique ni de châteaux en Espagne bien que Suzette descende de la famille d’Albon et Jean-Marie des Commiers. Par ailleurs, nous cherchons des cousins célèbres comme Renée qui cousine avec Jean-Pierre Foucault par alliance au 26e degré et Marcel qui cousine avec Steevey Boulay. Que du bonheur !»

Qu’à cela ne tienne, René ne désespère pas de trouver des adhérents pour financer les multiples projets : « Je ne comprends pas pourquoi les gens sont devenus si égoïstes et refusent d’aider une association comme la nôtre. Les individualistes ont quand même un comportement qui nous rappelle les heures les plus sombres de notre histoire. »

Mais René reste passionné par la généalogie, il est remonté jusqu’à en 1547 : « Oui, j’étais très ému lorsque j’ai retrouvé cet ancêtre, mais je le fus bien plus lorsque j’appris que mon bisaïeul par alliance était notaire de Bourg-en-Bresse… Enfin… Je suis aussi fier de mes ancêtres paysans (rires). Bien qu’il n’y en ait pas eu beaucoup… Oh, et puis on ne peut pas vraiment être fiers de nos ancêtres. Il me semble que j’ai lu ça dans un livre de Kant ou de BHL. »

René parcoure depuis toute la France, de Brest à Nancy, de Calais à Nice. La généalogie demande beaucoup de temps et d’argent, mais René a toujours le bon mot pour rassurer les futures générations : « Si je pars à travers la France, au Mont Saint-Michel, au Cap d’Agde, à Saint-Tropez ou encore au Touquet, c’est pour pouvoir faire des relevés qui aideront les générations futures et leur épargner ce terrible sacrifice financier ; mais vous savez, l’argent ne fait pas le bonheur et il faut savoir prendre le temps, même si c’est de l’argent, car tout vient à point à qui sait attendre. »

Lorsque l’on interroge René sur les nouvelles technologies, ce jeune retraité, qui maitrise bien l’informatique nous dit : « Oh oui, mais je n’ai pas confiance en Geneanet ; ce n’est pas assez sourcé. Et de toute manière, je me refuse à faire un arbre sur Heredis dont l’ergonomie est certes potable mais où le respect de la norme Gedcom 5.5 laisse à désirer. Et je souhaite, pour une plus grande limpidité pour les générations futures dire à quel point je suis scandalisé des demandes de licences GNU pour les gedcom publiés online où les sources pour les BMS/NMD sont mal gérées par le protocole sans oublier ceux qui utilisent l’ASCII alors que l’UTF-8 définit, lui, un codage pour tout point de code scalaire. »

Car la généalogie, pour René, doit être accessible à tous. Mais pas pour les copilleurs : « Le copillage et la guerre en Afghanistan sont les fléaux de notre temps. La solution ? Seuls les adhérents de plus de quatre ans et validés par le Conseil d’Administration en session extraordinaire pourront accéder à nos relevés. […] Les modalités sont simples, outre la date d’adhésion, il faut avoir relevé 10’000 actes de naissances ou 7’000 de mariages dans des communes librement choisies parmi dix propositions dans les Basses-Alpes, les Alpes-Maritimes, l’Isère et l’Ain. » René qui a des ancêtres à Reillanne, Fontan, Saint-Sorlin-de-Morestel ou encore Buellas se plait de ses origines variées : « Nous promouvons la diversité et la tolérance et j’en suis l’exemple même par mes origines exotiques comme cet ancêtre breton qui, à ma grande surprise, n’était ni marin ni éleveur de cochons. » La diversité d’opinion est aussi importante en généalogie, nous assure-t-il ; ainsi « l’Association prône le débat et les opinions variées même si les mesures doivent faire l’objet d’un large consensus au 5/6e et respecter les articles L.150 à 162.4 du Code de Déontologie Intérieur de l’Association. Nous ne sommes pas sectaires comme le Jockey Club, vous voyez ! »

L’association a pour but de transmettre son savoir aux adhérents et leur inculquer notamment que « la généalogie n’est pas une collection d’ancêtres ». Quand on demande à René s’il n’est pas un peu addict à la généalogie, il répond que non, mais qu’il a « tout de même du mal à s’endormir [s’il n’en a pas fait] de la journée. »

René en bon généalogiste est un admirateur du passé : « De mon temps, les gens étaient solidaires et on ne laissait personne mourir de faim. Cette époque me manque, on nourrissait Cosette, on s’offusquait de la Marquise de Merteuil, on était républicain comme monsieur Homais, fraternels comme Blanqui. Maintenant, regardez où va le monde ! On copie même les arbres en ligne de Geneanet ! » »

Vous aussi, désormais, écrivez des biographies imaginaires de généalogistes clichés.