Salomon de La Garde, l’homme qui épousa ses nièces

Aujourd’hui sur Sacrés Ancêtres! nous retournons dans la communauté juive de la Provence médiévale et je vais vous parler, plus précisément, d’un ancêtre.
Nous avons pu voir dans les précédents articles de cette série le contexte général et les mécanismes de conversion, mais il me semblait aussi nécessaire, afin de rendre tout ceci moins abstrait, de parler précisément de certaines personnes.

Je vous épargnerai la biographie de chaque ancêtre juif que j’ai pu dénicher dans cette recherche et me concentrerai sur deux d’entre eux : Salomon de La Garde, converti au christianisme suite à l’expulsion des Juifs de Provence, et dans un prochain article Venguessette de Monteils (ou Monteux) femme assez remarquable par son indépendance et son rôle financier dans le XIVe siècle marseillais.

Maintenant, parlons de Salomon de La Garde.

La famille de Salomon de La Garde

Salomon de La Garde est l’un des deux fils connus de Vitalis de La Garde et de Régine. Le métier de Vitalis m’est inconnu, mais il était actif dans les échanges et les prêts dans la ville d’Aix-en-Provence au XVe siècle et il est possible qu’il ait été médecin. Il était lui-même fils d’un couple mystérieux : Vitalis Josse de Posquières et Douce Vitalis. Vitalis de La Garde est d’ailleurs cité dans le testament de Douce, une tante : cette dernière avait épousé le frère de Douce Vitalis, Durand Vitalis, et le couple n’avait, semble-t-il, pas eu d’enfants. On peut noter que le manque de renseignements en dehors des filiations rend parfois la présentation un peu aride.

Ce qui nous intéresse ici, c’est la famille proche de Salomon. Tout d’abord son frère, Mosse Vitalis de La Garde, qui a épousé une fille de la famille de Carcassonne et plus précisément la sœur du premier mari de sa mère (vous suivez ?) ! En effet, avant d’épouser Vitalis de La Garde, Régine avait été mariée à Bonjues Mordacaysse de Carcassonne, fils d’un médecin aixois très actif et issu d’une famille assez bien étudiée, notamment par Noël Coulet puis Danièle Iancu. Bien que la famille ait été largement étudiée, elle reste source de maux de têtes pour votre serviteur et probablement désormais pour vous aussi, chers lecteurs !

De son premier mariage, Régine avait aussi eu deux fils : Abraham Bonjues et Jacob Bonjues. Le premier sera important par la suite et nous y reviendrons, mais le second a un point commun avec mon aïeul Salomon de La Garde : il a épousé deux de ses nièces. A vrai dire, Jacob Bonjues de Carcassonne s’est marié quatre fois.
Ses épouses-nièces sont la fille de son frère Abraham Bonjues, Tholsane, et une fille de son demi-frère, Tholsane de La Garde. Ainsi, Tholsane de la Garde a pour grand-mère paternelle Régine, mère de son mari. Mieux encore, la mère de Tholsane est Astruguette de Carcassonne, tante paternelle de son mari, ce qui fait de ce mariage une union entre un oncle et sa nièce qui sont aussi cousins germains. Voilà… on peut pas faire mieux !

Le méli-mélo impliquant Jacob Bonjues de Carcassonne et ses nièces/épouses. Doliprane non inclus.
(cliquez sur l’image pour agrandir)

Afin de simplifier la généalogie de la famille de Salomon de La Garde, voici un tout petit arbre de sa famille proche :

L’arbre généalogique de Salomon de La Garde incluant ses frères, parents et grands-parents
(Cliquez sur l’image pour l’agrandir)

Salomon, baylon de la communauté juive d’Aix

On croise Salomon de La Garde pour la première fois en 1460, il doit être alors très jeune, probablement une vingtaine d’années, et est cité comme baylon de la communauté juive d’Aix-en-Provence. Mais qu’est-ce donc qu’un baylon ?

Les baylons sont définis comme les syndics ou administrateurs des anciennes juiveries. Représentants et responsables de leur communauté, Danièle Iancu en donne la définition suivante dans son article « Topographie des quartiers juifs en Provence médiévale » (dans la Revue des Études Juives, tome 133 n°1-2, publié en 1974 ; long article qui couvre les pages 11 à 156 de ce numéro) :

Les quartiers juifs possédaient une organisation bien structurée, l’ « Universitas Judeorum », dirigée par trois baylons. Ces baylons […] veillaient à l’observation de la Loi hébraïque, établissaient les impôts et percevaient ceux qui frappaient la communauté.

Danièle Iancu, « Topographie des quartiers juifs en Provence médiévale », op.cit., p.154

Salomon, très jeune, était donc déjà parmi les dirigeants de la communauté ce qui laisse penser que son père avait dû l’être avant lui ainsi que des membres de la famille de sa mère (son premier mari par exemple). Si j’estime que Salomon devait être jeune, c’est pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il se remarie en 1479 après avoir eu au moins un fils de sa première épouse. Déjà, s’il avait eu 20 ans en 1460, il aurait eu 39 ans à son remariage, ce qui est assez tardif. Sachant que sa femme est la soeur de sa précédente femme, l’écart d’âge ne devait pas être gigantesque entre elles deux et pourtant sa deuxième femme lui donna au moins trois enfants toujours vivant au début du XVIe siècle. Enfin, dernier élément, Salomon de La Garde n’était pas encore médecin et commençait probablement à peine à étudier cet art.

On retrouve Salomon de La Garde comme baylon de la communauté en 1474, 14 ans après. A partir de ce moment-là, il restera en place à la tête de la communauté juive d’Aix-en-Provence presque chaque année jusqu’au rattachement à la France : 1474, 1475, 1478, 1479, 1481, 1482, 1483, 1484, 1489. Et encore, ce sont toutes les années où on le trouve cité comme tel : on peut tout à fait penser qu’il l’a été à d’autres reprises, mais nous n’avons pas de mention directe.

Cette omniprésence dans le « triumvirat » qui dirige la communauté souligne l’importance sociale de Salomon, probablement sa fortune, mais aussi ses liens familiaux avec d’autres puissantes familles juives de la région. Si on en sait fort peu sur la famille de son père, on sait que sa mère descend de familles juives de Marseille, fille d’Abraham de Bédarrides et de Mayrone Maymon, elle-même fille d’un notable marseillais qui a laissé quelques traces manuscrites et d’une femme d’affaires remarquable sur laquelle portera le prochain article consacré à ces aïeux juifs. Toujours du côté de sa mère, je rappelle que Salomon de La Garde a des demi-frères, de la famille de Carcassonne, dont l’un a épousé la petite-fille du médecin du roi René. Alliée aux plus influentes familles juives provençales de l’époque, la famille de Salomon de La Garde est en fait toujours présente parmi les dirigeants de la communauté. Cela a valu à l’époque quelques reproches de la part de juifs moins fortunés qui voyaient ce clan de médecins et marchands, tous parents et alliés entre eux, « truster » les places et les postes importants.

Salomon, le médecin

En février 1474, Salomon de La Garde devient médecin. Pour être précis, entre le 4 et le 21 de ce mois, son statut change. Quel était le processus pour devenir médecin dans la communauté juive d’alors ? Peut-être que Salomon a étudié auprès de médecins juifs et qu’ils l’ont reconnu apte ? Ce serait un sujet à creuser de mon côté, au moins par curiosité.

Mais le statut de médecin, dans ce cas particulier, suggère d’autres questions : est-ce que l’activité de médecin était assez rentable ? On voit tous ces médecins juifs aixois dans un microcosme où leur métier semble être moins mis en avant que leurs activités financières. Une seule exception me vient en tête, celle d’Abraham Salomon, connu essentiellement pour avoir été le médecin du roi René. Mais n’est-ce pas là un biais des sources ? Je m’explique. Notre connaissance de l’activité de ces médecins dépend essentiellement d’un même corpus : les archives notariales. Ces documents enregistraient beaucoup de choses, mais presque rien concernant la médecine. Par contre, elles regorgent de prêts, de quittances et autres documents financiers ! Si la finance et le prêt à intérêt étaient des activités rentables, elles n’étaient peut-être que des compléments dont on ne saurait évaluer l’importance.

Les prêts n’étaient d’ailleurs pas toujours très rentables. Défauts de paiement ou simplement retards (parfois de plus dix ans !) étaient monnaie courante. Mais un autre élément, soulevé par Juliette Sibon dans sa thèse sur les Juifs de Marseille au XIVe siècle, est éclairant : les Juifs empruntaient de l’argent avant de le prêter. Les nobles, les grands marchands et le clergé prêtaient à taux usuraire aux Juifs de Marseille qui faisaient ensuite de même. Tout un système est en place qui combine bénéfice financier et réseau de clients. Une toile de relations de clientèle et amicales sur fond de tension entre clans se dessine dans le Marseille médiéval. Le prêt est un moyen de renforcer ces liens.

Mais revenons à notre Salomon médecin. Nous ne savons pour ainsi dire rien de sa pratique médicale, mais nous trouvons trace, en 1467, d’une commande particulière. Alors qu’il n’est pas encore médecin, Salomon se fait commander la copie d’un ouvrage de médecine juive. Les prix de certains livres, manuscrits, sont sans commune mesure avec ce que l’on peut imaginer aujourd’hui. Pour donner un ordre d’idées, un livre manuscrit dans une maison juive a été estimé à 40 florins (lors du contrat de mariage de Régine Abram de Draguignan, cité par D. Iancu). Avec 100 florins, on pouvait s’acheter une maison à Aix-en-Provence. 40 florins, cela représente d’avantage que les bijoux de noces dans ces familles et en général, les dots des filles aisées dans ces familles juives tournaient autour de 300 florins.

Cet achat de livre nous indique qu’en 1467 la formation de Salomon avait probablement débuté ou était sur le point de commencer. Il a fallu attendre 7 ans après cette commande pour que Salomon de La Garde devienne médecin… Comme quoi, lointain Moyen-âge peut-être, mais finalement, leurs études de médecine semblaient aussi longues qu’aujourd’hui !

Parlons d’argent !

Salomon de La Garde est impliqué dans des prêts et notamment en tant que baylon de la communauté juive. En 1479, plusieurs juifs aixois, dont Salomon, remboursent à une certaine Catherine Goyne la somme 600 florins. Cet emprunt, conséquent, a dû être fait pour la communauté par les baylons et d’autres notables (pour rappel Salomon était un de ces baylons en 1479).

Pourquoi de tels prêts à la communauté ? Il semble qu’en général, ces prêts étaient demandés afin de payer les impôts écrasants sur les Juifs. On retrouve d’ailleurs Salomon avec 16 coreligionnaires en 1490 qui empruntent de l’argent aux héritiers de François Perussi, un très riche marchand avignonnais originaire de Florence. La somme exacte ? 3000 florins ! Pour vous donner encore une fois un ordre d’idée, le 25 novembre 1489, Salomon de La Garde doit vendre sa maison pour payer les 40 florins exigés par la tallia judeorum (l’impôt sur les Juifs)… Étant donné son niveau de vie, il est tout à fait envisageable que la vente n’ait pas eu les mêmes conséquences que si aujourd’hui quelqu’un était obligé de vendre sa maison pour payer un impôt !

Les mariages de Salomon !

Ah, enfin ! On entre dans le vif du sujet annoncé dans le titre !

Salomon a épousé deux soeurs, Roussa et Doucette de Carcassonne. Pour la première épouse, nous n’avons pas trace de leur contrat de mariage. Il y en a forcément eu un, étant donné le milieu et étant donné qu’un fut fait pour la soeur, mais il est probablement perdu. Il est difficile d’estimer quand ce mariage eut lieu. Le couple Salomon-Roussa eut un fils : Abraham Salomon. Huit ans après le remariage de son père, il se marie. Nous sommes en 1487. S’il était âgé d’une vingtaine d’années, cela le ferait naître vers 1467 et je doute que ce soit plus ancien car il est non seulement le seul enfant connu du couple, mais en plus, le remariage de Salomon en 1479 avec sa belle-soeur dont il eut au moins trois enfants, suggère que tant Doucette que Roussa devaient être assez jeunes. Malheureusement, il y a tellement de paramètres à prendre en compte qu’une hypothèse sur la naissance d’Abraham Salomon ne peut être avancée sans risques majeurs d’être erronée. Contentons-nous donc des informations que nous avons !

En 1479, donc, Salomon de La Garde, devenu veuf, épouse sa belle-soeur, Doucette de Carcassonne. Elle est veuve d’Abraham Vitalis Creyssent, de la ville d’Hyères. Doucette n’est donc pas une adolescente ou une toute jeune adulte et devait avoir dans les 25 ans environ pour être à la fois veuve et devenir mère à trois reprises au moins. Le contrat de mariage stipule une dot de 300 florins, ce qui correspondait à la moyenne des dots pour ces familles juives aixoises. Une dot confortable mais qui n’était pas mirobolante. On peut penser que Salomon ayant déjà la dot de la soeur aînée et un héritier mâle, pouvait accepter cette dot honorable qui resserrait encore davantage les liens avec les Carcassonne. Par contre, aucune mention du lien de parenté entre Roussa et Doucette, ni même entre elles et leur oncle/époux !

Ce n’est qu’en 1510, dans un acte du 15 juillet (coté 309 E 422 f°285 aux AD13) que nous apprenons les liens de parenté qui unissent tout ce beau monde. Et quels liens ! Un homme qui épouse sa nièce puis son autre nièce qui était sa belle-soeur ! Toutes deux sont les filles d’Abraham Bonjues de Carcassonne, frère utérin de l’époux, et de Benestrugia Abram dont le grand-père paternel, Abraham Salomon, était le médecin du roi René.

Les liens de parenté entre Salomon et ses deux épouses-nièces (cliquez pour agrandir)

Expulsion des juifs et conversion

Lorsqu’en 1500 puis 1501, le roi de France décrète l’expulsion des Juifs de Provence, un choix est à faire : s’exiler ou se convertir.

Salomon de La Garde et son épouse Doucette décident de se convertir, ainsi que leurs enfants. Ils changèrent donc complètement d’identité. Salomon devint Elzéar et Doucette devint Louise. Adoptant le nom de famille Louis (parfois écrit Louys), probablement lié à un parrainage, ils devinrent ce que l’on nomme des néophytes, c’est-à-dire de nouveaux chrétiens.

Leur conversion fut très tardive. Dans le précédent article sur les conversions, nous avons vu que des Juifs commencèrent à se convertir en masse dans les années 1490 suite au rattachement à la France et à l’augmentation des tensions, mais les Louis attendirent le dernier moment et ne se convertirent qu’à l’annonce de l’expulsion des juifs de Provence, soit en 1500-1501. Ils font partie de la dernière vague de convertis.

Les enfants de Salomon/Elzéar se convertirent aussi à une notable exception : une de ses filles, Duranta. Duranta est restée juive et, pourtant, lorsque son père fait son testament chrétien en 1510, il la cite comme légataire. On suppose que Duranta est allée dans le Comtat Venaissin voisin qui, n’étant pas français, n’était pas soumis à l’expulsion.

Abraham Salomon, fils du premier mariage de Salomon, devint Pierre Louis tandis que les deux autres enfants connus du couple, Françoise et Honorat, n’apparaissent dans la documentation qu’après leur conversion. Françoise Louis est mon ancêtre à la 16e génération.

Françoise se marie peu après, en 1504, avec le nouveau converti Avinion de Sauvecane, également aixois. Les liens entre ces familles semblent se renforcer puisqu’au testament de Jean de Sauvecane, en 1505, l’exécuteur testamentaire est Elzéar Louis. Avinion de Sauvecane, lui, sera l’exécuteur testamentaire de sa belle-mère Louise Louis. S’agit-il seulement d’une présence due à l’alliance entre ces familles ? Pour être honnête, j’en doute. Je pense que ce qui devrait être mis en avant, ici, est qu’il s’agit de familles de néophytes. Elles étaient assez peu nombreuses finalement et étaient soudées. Soudées en tant qu’anciennes familles juives convertis, ayant déjà un passé commun et donc de forts liens, mais aussi parce qu’il fallait environ deux générations pour que les nouveaux convertis commencent à vraiment s’allier aux anciens chrétiens. Ce réseau néophyte se distingue clairement dans le testament de Salomon/Elzéar.

Le testament d’Elzéar Louis

Le 5 mars 1506, à Aix-en-Provence, le néophyte Elzéar Louis passe son testament (aux AD13 en 309 E 275 f°203). On y trouve le réseau néophyte dans la liste des sept témoins… qui sont tous des nouveaux convertis. L’importance du statut de néophyte et de la solidarité que cela implique saute aux yeux. Mais intéressons-nous aux clauses testamentaires !

Tout d’abord, Elzéar élit sa sépulture dans le cimetière du couvent de l’Observance, devant l’entrée de l’église. Puis il fait des legs à sa famille : sa femme qui récupérera sa dot de 300 florins auxquels s’ajoutent ses vêtements et « tous ses bijoux d’or, d’argent et de perles ».

Il passe ensuite à ses enfants et fait des legs symboliques à son fils aîné, Pierre, et à sa fille Françoise pour les mêmes raisons. Ils ont déjà eu leur part d’héritage, Françoise lors de son mariage et pour Pierre peut-être au sien ou par une donation plus tardive. Elzéar fait le même legs symbolique de 5 florins pour son autre fille Duranta, restée juive.

Puis il nomme comme héritier universel son dernier-né, Honorat. Ce dernier étant mineur, il nomme sa femme comme tutrice et demande qu’un inventaire de ses biens soit réalisé. Malheureusement, nous n’avons pas l’inventaire des biens d’Elzéar Louis. Cela aurait permis d’en apprendre tellement plus !

En 1517, neuf ans après ce testament, on sait qu’Elzéar est décédé et le 22 septembre, sa veuve passe elle aussi son testament au contenu proche de celui de son défunt époux. Elle souhaite être inhumée à ses côtés et fait un legs symbolique de 5 florins à Françoise auquel elle ajoute quelques vêtements. Duranta n’est plus citée. Soit cette dernière est décédée, soit les liens ont disparu. Quant à Pierre, lui aussi est absent du testament, ce qui est assez logique puisqu’il n’est pas le fils de Louise mais de sa soeur aînée. Enfin, Honorat est toujours vivant et est aussi son héritier universel.

Je ne sais pas ce qu’il est advenu d’Honorat Louis. A-t-il vécu ? Il était toujours mineur en 1517 et je ne trouve plus trace de lui. Pierre s’est marié, nous l’avons vu, en 1487 et eut deux filles. Quant à Françoise, elle eut une dizaine d’enfants. Le testament de Louise Louis stipule qu’en cas de pré-décès de Honorat, elle lui substitue Françoise (pour faire simple, si Honorat décède sans enfants légitimes, c’est sa soeur qui hérite du tout). Si Honorat est en effet décédé sans enfants légitimes, alors Françoise récupère la totalité des biens de sa mère et les deux-tiers de celles de son père (qui avait substitué sa femme, Françoise et Pierre le fils aîné). Ce système de substitution est une aubaine pour le généalogiste et l’historien car il permet de voir l’ordre privilégié par le testateur concernant son héritage mais aussi car dans la liste des substitutions peuvent apparaître d’autres membres de la famille dont nous n’avions pas connaissance.

Nous avons pu voir la vie assez longue et remplie de Salomon de La Garde. D’une famille de juifs aixois, il fit partie des baylons de la communauté à de nombreuses reprises tout en pratiquant la médecine et le prêt. Ayant gardé sa religion jusqu’à la dernière limite, il finit par se convertir au christianisme en 1500-1501 et resta proche de ses anciens coreligionnaires devenus néophytes. Marié deux fois avec ses nièces, pratique assez peu courante mais déjà attestée dans sa famille et dans d’autres, l’on pourrait s’interroger sur les mécanismes de l’alliance dans ces familles juives particulièrement endogames dans certains cas alors qu’elles n’hésitaient pas à aller chercher le conjoint dans d’autres communes de Provence.

Le prochain article de cette série sur ces ancêtres juifs sera aussi un portrait : celui de Venguessette de Monteux, une femme d’affaires dans le Marseille du XIVe siècle !

Samedi prochain sur Sacrés Ancêtres ! : Quand deux enfants illégitimes se marient et que la situation est intrigante, Sacrés Ancêtres! mène l’enquête. Vous en saurez plus dans cet article intitulé sobrement : « Le bâtard du seigneur ».